C’est d’abord son sens de l’humour qui perce
Il est né à Chambéry, « en France », précise Jean-Sébastien Silvestre avec malice, faisant allusion à l’histoire de la Savoie. Puis, très vite, sa fascination pour les mécanismes du vivant transparaît. Pourquoi la recherche ? « D’aussi loin que je me souvienne, j’ai voulu comprendre comment les êtres vivants fonctionnaient. »
Il assume ensuite avoir choisi la spécialité cardiovasculaire à l’université Joseph-Fourrier de Grenoble, « car le professeur responsable organisait des séances de dégustation de vin les vendredis… » Hasard, intuition, le cœur en tout cas n’en finit pas de l’émerveiller, plus de vingt ans plus tard : « C’est un objet d’étude extraordinaire ! Il se contracte environ 70 fois par minute pendant 75 à 80 ans, fonctionne de manière autonome et à l’électricité… décarbonée, glisse-t-il en souriant. Et comme pour tous les mécanismes biologiques, rien n’est dû au hasard. Chaque élément, cellule, protéine, a un rôle précis pour que l’ensemble fonctionne de manière synchrone. »
Penser collectif
Selon le chercheur, appréhender la complexité de ces rouages demande un bon sens de l’observation, une capacité d’analyse et de synthèse certaine et, surtout, de garder l’esprit ouvert, laisser le champ libre à l’interprétation. « J’y vois une similarité avec l’art d’Edward Hopper, auquel je voue une passion particulière, confie-t-il. On pénètre en voyeur dans des tableaux où tout semble scénarisé, en cherchant à percer le mystère de l’instant. »
Ce qui nourrit son enthousiasme pour le métier, c’est aussi l’aventure collective de la recherche : « Au sein de l’équipe, des structures de recherche et à l’international, chacun apporte sa pierre à l’édifice… Les découvertes des uns nourrissent celles des autres… Même si au final il n’y a qu’un Prix Nobel. »
Et d’ajouter, serein : « On apprend, avec l’expérience, à revenir sur ses hypothèses, à repartir dans une nouvelle direction. Car, il faut bien le dire, ça ne marche pas souvent. Mais il faut continuer à chercher pour mieux comprendre et continuer à comprendre pour mieux traiter les patients. »
Son objectif, ambitieux, est de développer une thérapie innovante pour régénérer le muscle cardiaque après un infarctus du myocarde. « Parce que la maladie n’est pas une fatalité ! »
Propos recueillis par Catherine Brun