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Directeur de Recherche, membre du comité de coordination de l'essai CORIMUNO-19, Centre de Recherche Cardiovasculaire de Paris, PARCC- Inserm UMR970, Hôpital Européen Georges Pompidou, AP-HP, Université de Paris.
« Une chaîne humaine remarquable s’est mise en place pour permettre le déroulement d’essais thérapeutiques comme CORIMUNO-19, une étude unique au monde ! »
Néphrologue de formation, Pierre-Louis Tharaux est directeur de recherche Inserm et coresponsable de l’équipe « Signalisation rénale et vasculaire : du développement à la pathologie », au Centre de recherche cardiovasculaire de Paris. Il s’intéresse aux maladies auto-immunes, en particulier des maladies rénales et vasculaires. « J’axe mes recherches sur un domaine qui me fascine : les conséquences de la perte de tolérance des organes à l’inflammation », précise Pierre-Louis Tharaux.
Et c’est par ce prisme qu’il a abordé la problématique du COVID-19. Il a très tôt proposé à REACTing un concept de stratégie thérapeutique reposant sur l’inhibition de l’inflammation et la protection d’organes et des vaisseaux. La structure REACTing et la promotion par l’AP-HP lui a permis de monter CORIMUNO-19, avec Olivier Hermine, Philippe Ravaud, Xavier Mariette et Matthieu Resche-Rigon.
Pierre-Louis s’enthousiasme : « Cette expérience dans un contexte dramatique est remarquable car il y a une immense mobilisation d’énergies, à l’Assistance Publique, dans les unités de recherche, sur le terrain avec les équipes de soignants qui recrutent les patients, avec les patients eux-mêmes qui comprennent les enjeux de ces essais. La chaine humaine qui permet la mise en place et le déroulement d’essais thérapeutiques comme Corimuno-19 est unique au monde. »
Pierre-Louis Tharaux : « L’étude CORIMUNO-19 repose sur la constitution d’une cohorte de patients infectés par le virus du COVID-19, en insuffisance respiratoire aiguë. Au sein de cette cohorte, différents traitements vont être testés. Ce sont essentiellement des immunomodulateurs, des médicaments qui modulent l’immunité, car les patients atteints du COVID-19 souffrent non seulement de l’infection par le virus SARS-CoV-2, mais également d’une réponse inadaptée de leur système immunitaire, voire de leurs tissus, à l’infection elle-même. Les approches que nous testons sont complémentaires aux stratégies antivirales évaluées dans d’autres essais. Ces traitements immunomodulateurs sont le plus souvent déjà bien connus et disponibles car prescrits pour d’autres maladies.
Le design des essais CORIMUNO est très original, il est adapté au contexte épidémique car les essais thérapeutiques sont et seront très rapidement évalués. 60 patients recevront la molécule testée et le traitement de référence. Ils seront comparés au groupe contrôle, soit 60 autres patients qui auront uniquement le traitement de référence. Ces effectifs seront révisables en fonction des analyses intermédiaires indépendantes. Je souligne que le tirage au sort des patients pour recevoir le traitement expérimental ajouté aux soins de référence est gage de rigueur et permet réellement de mesurer l’évolution de la maladie COVID-19 chez des patients comparables.
Tous les patients inclus dans les essais sont hospitalisés et ont tous besoin d’un apport en oxygène, mais pas nécessairement d’une ventilation mécanique. CORIMUNO-19 existe grâce à la mobilisation inouïe de centaines de personnes depuis le début de l’épidémie. C’est une démonstration que les énergies peuvent se mobiliser avec organisation et sang-froid pour conduire une recherche rigoureuse en pleine épidémie dramatique pour obtenir des résultats à court-terme. »
P.T. : « Huit essais thérapeutiques sont déjà prévus dans CORIMUNO, dont plusieurs destinés à tester des traitements qui n’ont jamais été utilisés auparavant dans le COVID-19. Deux autres essais visent à évaluer l’impact de traitements qui ont déjà été donnés dans le soin courant, comme des anticoagulants ou des corticoïdes. Pour ces médicaments, nous allons étudier leur efficacité en fonction notamment des doses car ils ne sont pas utilisés partout de la même manière.
Il y a donc plus de 8 nouveaux traitements à évaluer et il y en aura d’autres si malheureusement l’épidémie devait se prolonger. Si nous avons des résultats positifs pour une molécule, elle rentrera dans le traitement de référence de l’essai suivant. »
P.T. : " Nous avons d’abord commencé à évaluer 2 anticorps qui bloquent le récepteur d’une molécule impliquée dans l’inflammation, l’interleukine 6. Ces anticorps sont le sarilumab et le tocilizumab. Nous terminons également l’évaluation d’un médicament qui leurre le récepteur d’une autre molécule inflammatoire, l’interleukine 1. Nous évaluerons aussi l’efficacité de molécules visant à protéger les vaisseaux qui sont endommagés par le COVID-19, non seulement à cause du système immunitaire mais aussi du virus lui-même. Des données récentes montrent en effet que le virus peut infecter différentes cellules, non seulement les cellules épithéliales pulmonaires, mais aussi les cellules rénales épithéliales, et aussi les cellules endothéliales et en particulier les petits vaisseaux. "
P.T. : « La FRM finance des mesures répétées appelées biomonitoring, qui viennent en support des essais thérapeutiques promus par l’AP-HP et qui permettent d’évaluer la réponse des patients aux traitements ainsi que leur profil biologique et immunologique. Les patients sont inclus dans les études uniquement selon des critères cliniques, il y a donc une forte hétérogénéité et on voit déjà que la réponse au traitement n’est pas la même chez tous.
Le biomonitoring vise à rechercher leurs particularités immunologiques, inflammatoires et biologiques, parmi des facteurs de l’inflammation, de la coagulation ou de lésions d’organes. L’objectif est de trouver des biomarqueurs qui permettront de mieux définir le profil des patients chez qui certains traitements sont efficaces ou pas, et d’être en capacité d’affiner nos recommandations éventuelles pour la prise en charge des patients dans les prochains essais. Ce projet nous permet également de valider les cibles potentielles de médicaments que nous pensons tester dans le futur proche, d’ouvrir des pistes et de renforcer ainsi les arguments scientifiques pour définir les prochains essais. Ce biomonitoring se fait au cours de chaque essai clinique. C’est une source d’informations majeure pour le développement des essais ! Un immense merci aux donateurs de la FRM ! »