M. C. d’E. : Comment fonctionne réellement l’hypnose ? B. F. : On commence aujourd’hui à observer le cerveau de personnes sous hypnose par la technique de l’IRM fonctionnelle mais les résultats sont pour l’instant très variés, empêchant tout consensus. À mon sens, il est difficile d’en conclure quoi que ce soit. Une chose est sûre cependant : aucun soupçon de magie dans l’hypnose. Une situation toute bête en guise d’exemple : si vous allez chez le dentiste et que vous vous dites que vous allez avoir mal, c’est uniquement parce que vous avez peur. Il faut donc détourner la conscience de cette peur. Et c’est toute la technique de l’hypnothérapeute. En parlant au patient, il va défocaliser son attention et l’orienter vers des pensées plus agréables. Cela demande un véritable savoir-faire. L’hypnothérapeute sait exactement quels mots utiliser et comment les utiliser en fonction de son interlocuteur.
M. C. d’E. : En médecine, comment l’hypnose est-elle utilisée ?
B. F. : Il existe trois types d’indication : l’hypnoanalgésie, utilisée pour diminuer une sensation douloureuse comme la pose d’une péridurale, l’hypnosédation, en accompagnement d’une anesthésie locale, et l’hypnothérapie, à visée psychothérapeutique. Les deux premières indications sont bien validées, en particulier l’hypnosédation pratiquée en vue d’opérations chirurgicales peu lourdes. Dans ce contexte, le but est de réduire la posologie des médicaments permettant d’endormir les patients. En outre, cela limite les complications potentielles et accélère la récupération du patient. L’intervention est aussi moins longue. Cette méthode a fait ses preuves, si bien qu’elle commence à ne plus être marginale. Certains hôpitaux l’utilisent d’ailleurs désormais en routine. L’hypnothérapie peut aussi être utilisée dans d’autres indications plus difficiles à évaluer comme l’anxiété ou les addictions. Mais les résultats sont très hétérogènes. D’un côté, il existe des cas cliniques impressionnants : des patients très anxieux, en grande détresse, ont connu de véritables améliorations grâce à l’hypnose. De l’autre, les études randomisées apportent des résultats plutôt décevants. On ne sait pas, aujourd’hui, d’où vient cette discordance. Il est possible que seuls certains patients soient réceptifs à l’hypnothérapie, ou bien que les études randomisées aient été mal réalisées.
M. C. d’E. : Qui pratique l’hypnose en milieu hospitalier ?
B. F. : La profession n’est pas du tout réglementée. N’importe qui peut se déclarer hypnothérapeute et c’est là un problème important. Néanmoins, en milieu hospitalier, il s’agit surtout de médecins anesthésistes qui ont souhaité tester cette méthode pour répondre à la demande des patients. Pour ce faire, ils suivent un cursus universitaire spécifique, mais ces formations ne sont pas reconnues par l’Ordre des médecins. Beaucoup de médecins généralistes utilisent aussi l’hypnose dans leur pratique quotidienne.
M. C. d’E. : La pratique de l’hypnose présente-t-elle des risques ?
B. F. : Les risques résident principalement dans l’utilisation malhonnête des techniques de suggestion, ou encore dans l’implantation, en général involontaire, de faux souvenirs. Les deux cas ont été constatés. Nous ne disposons pas de données solides concernant ces événements mais, a priori, ils sont peu fréquents.