Les maladies immunitaires sont nombreuses et diverses. Les plus fréquentes sont les maladies auto-immunes et les maladies allergiques. Il s'agit de maladies complexes qui résultent d'une interaction malheureuse entre l'inné et l'acquis c'est-à-dire entre des gènes de prédisposition et l'environnement. Il est important de préciser qu’il s’agit tant pour l’auto-immunité que pour l’allergie de maladies polygéniques posant une problématique très différente de celle des maladies monogéniques mendéliennes qui concernent la grande majorité des maladies rares.
L'approche génétique des maladies polygéniques a été abordée depuis plusieurs dizaines d'années avec, il faut le reconnaître, un succès limité. Certes, pour ce qui concerne les pathologies auto-immunes ou du moins certaines d'entre elles, le rôle des gènes du complexe majeur d’histocompatibilité ou HLA a été bien démontré. L’accès aux techniques modernes de la génomique avait fait naître il y a une vingtaine d'années un espoir considérable. On pensa alors que l'étude des associations (GWAS pour « Genome Wide Association Studies) qui pouvaient exister entre les balises (SNIPs pour « single nucleotide polymorphisms ») présentes sur le génome et les diverses maladies auto-immunes permettraient d'identifier les gènes de prédisposition at aboutir donc à la possibilité d’un dépistage génétique des individus à risque.
Malgré les efforts considérables développés dans ce sens, portant sur des dizaines de milliers de malades, il faut bien admettre aujourd'hui que cette approche s'est révélée relativement décevante. Certes de très nombreuses régions de prédispositions, incluant des gènes potentiellement intéressants, ont été identifiées. En fait leur nombre est tellement élevé qu'il n'est pas compatible avec l'hérédité de ces maladies. On en compte plus de 200 dans la sclérose en plaques, plus de 150 dans les maladies inflammatoires de l'intestin et plus de 100 dans le diabète insulinodépendant. Dans la grande majorité des cas, il s’agit encore une fois de régions génétiques au sein desquelles les gènes n'ont pas été identifiés et, en tout état de cause, le risque relatif ou odds ratio (OR) associé à ces régions de susceptibilité reste faible entre 1,2 et 1,5. De toute évidence, il va falloir trouver d'autres approches pour progresser. L'hypothèse la plus plausible est que nombre de ces maladies, auto-immunes ou allergiques, sont liées à la présence de variants génétiques rares qui ne sont pas identifiés par l’approche globale portant sur de très grandes cohortes de malades.
La recherche de ces variants, qui va supposer des explorations ciblant des familles plutôt que des cohortes, va poser d'énormes problèmes logistiques. Elle est pourtant essentielle. Heureusement, elle sera aidée par les progrès très rapides de la technologie génomique. Le même commentaire peut être fait pour les modifications de l'architecture du génome qui peuvent contribuer à la prédisposition à la maladie. D'autres concepts doivent être pris en compte tels que l’épistasie, c'est-à-dire l'influence sur un phénotype donné de l’action d’une combinaison de gènes ou encore, l'épigénétique c'est-à-dire la modification de l'expression des gènes suite à des changements biochimiques de l'ADN (acétylation, méthylation des histones) sans modification de la séquence de l'ADN.
Ces recherches ont un intérêt majeur. On estime que l’on connaît aujourd’hui seulement 20 à 30 % des facteurs qui déterminent l'héritabilité des maladies auto-immunes et allergiques. Seul le jour où ce fossé des 70 % restants sera en grande partie comblé, on peut espérer mieux comprendre la pathogénie de ces maladies ce qui conduira à affiner leur diagnostic, permettre leur dépistage et, surtout, trouver de nouveaux traitements.
Le rôle de l'environnement doit être également pris en compte. On sait qu'il est important, comme en témoigne le taux très élevé de discordance de la survenue des maladies auto-immunes dans des couples de vrais jumeaux. Encore faut-il remarquer, que cette discordance pourrait être expliquée, en partie, par des mutations survenant après la séparation des deux œufs. Il ne faut pas oublier, en effet, que certes l'environnement n'est pas tout à fait le même entre jumeaux monozygotes mais il est néanmoins très semblable, du moins pendant l'enfance. L'environnement peut agir en déclenchant la maladie. C'est évidemment le cas dans les allergies avec les allergènes. Mais même dans ce cas les allergènes ne résument pas tout puisque certains sujets appartenant à la même famille sont plus ou moins allergiques à différents allergènes. Le problème est encore plus difficile dans les maladies auto-immunes où, à quelques exceptions près, on ne connaît pas les facteurs déclenchant ces maladies. Le rôle d'agent infectieux, notamment de virus, a été évoqué depuis longtemps mais avec un succès très limité. C'est un sujet de recherche considérable mais très difficile. Il ne peut passer que par l'étude de grandes cohortes de sujets suivis depuis la première enfance.
De façon inattendue, l'environnement semble pouvoir également présenter un effet protecteur. On s’est en effet aperçu qu'il y avait une association très forte entre la diminution de la fréquence des maladies infectieuses et l'augmentation de celle des maladies allergiques et auto-immunes. Des arguments robustes suggèrent une relation de causalité entre ces deux observations, c'est la théorie hygiéniste. En quelque sorte, les infections protègent contre les maladies auto-immunes et allergiques. La diminution de leur fréquence dans les pays industrialisés au cours des quatre dernières décennies pourrait expliquer l'augmentation de celle des maladies auto-immunes et allergiques. Des travaux très importants sont déjà consacrés et devront l'être encore plus dans l'avenir aux mécanismes au travers desquels les infections protègent contre les maladies immunitaires en question. On peut espérer dériver de ces recherches des traitements préventifs qui pourraient être administrés avant la survenue de ces maladies.
Les maladies auto-immunes et allergiques ne résument pas l'ensemble de l’immunopathologie. Le cas des déficits immunitaires, qu'ils soient héréditaires ou acquis, dépend à l’évidence de facteurs génétiques et environnementaux. La situation est néanmoins assez différente. Le rôle des gènes ayant une action directe sous la forme d'une maladie monogénique et plus souvent en cause même si, l’on commence à entrevoir que les remarques qui viennent d'être faites pour les maladies polygéniques auto-immunes et allergiques s'appliquent également, pour une large part, aux déficits immunitaires dont l’expression clinique (le phénotype) peut varier en fonction de variants rares associés à la mutation génétique de base.